Je suis surprise par le peu d’engouement (que dis-je par le mépris ? le dédain ?) affecté par la classe des gens de gauche, ultra-gauches, anarchistes et autres libertaires que je côtoie régulièrement, envers les gilets jaunes.
- Ah oui, ceux que nous sommes sensés représenter dans nos luttes.
- Ah oui, ceux que nous voyons de loin au fond de la tranchée.
- Ah oui, ceux que nous voyons de loin pendus comme des singes au camion benne.
- Ah oui, ceux que nous voyons de loin installer les décos de noël de nos villes et villages.
- Ah oui, ceux que l’on voient de loin nettoyer les sols de nos hôpitaux et nos cantines.
- Ah oui, ceux que nous voyons de loin travailler dehors en hiver.
Ah oui ceux là .....ils ne vont tout de même pas s’émanciper, s’exprimer, se défendre !
Ou alors c’est parce qu’ils sont d’extrême droite car :
- ils sont illettrés,
- ils n’ont même pas la conscience d’exister,
- ils n’aiment pas la politique,
- ils votent parfois pour une blonde en signe de contestation,
- ils ne mangent pas bio,
- ils mangent de la viande deux fois par jour,
- ils vont au mac do et au centre commercial,
- ils regardent TF1,
- ils vont à la chasse,
- ils croient aux chefs,
- Ils respectent les forces de l’ordre,
- ils aiment les couleurs bleus, blancs et rouges,
- ils n’écoutent que des populistes.
Oui, ils sont le peuple criant fort, parlant mal, puant, violent même parfois. Leurs mots ne sont pas toujours grandiloquents. Leur vision du monde est souvent celle que la télé leur offre.
Mais sur ces ronds points, ils sont solidaires, ils sont Debout, ils sont en lutte, ensemble. Les automobilistes qu’ils filtrent leurs sourient, lèvent le pouce ou les applaudissent en majorité. Ils leur apportent à manger, font klaxonner leur véhicule en geste de soutien.
Ainsi, à LIVRON, quand les CRS ont enlevé les barrages ce 20 novembre à 18h, ils ne se doutaient pas qu’à 18h30 tout serait à nouveau en place. Car ces gens du peuple et ces gens du voyage, avec leurs camions benne à ferraille et leurs petites grues, avaient tout reconstruit et réapprovisionné avec des tonnes de palettes en quelques dizaines de minutes !
- Fiers de se sentir utiles !
- Fiers d’être à côté de « nous » !
- Fiers de ne pas être regardés, pour cette fois, comme des voleurs de poules !
ils sont ce peuple que nous avons tant et tant attendu lors de nos luttes. Ceux que nous appelons et critiquons par la suite car ils ne se lèvent pas.
Et bien ils sont là, dans la rue. Et nous, nous n’ y sommes pas.
Il se passe quelque chose d’important ! Venez voir et discuter sur les ronds points et pourquoi pas rester ensemble, pour une fois, sans se demander de quel côté nous sommes, de quel bord. Et si nous mettions nos différences de côté. Et si on avait le courage du front social dont nous parlions, il y a encore peu. Et si on avait le courage de sortir de notre « entre soi » confortable douillet.
Car sur ces ronds points, nous sommes tous ébahis
- du plaisir de parler entre êtres humains,
- du plaisir de ne pas s’abrutir devant la télé,
- du plaisir de se sentir humain parmi des humains,
- du plaisir de se sentir tous solidaires,
- du plaisir d’enfin lutter côte à côte,
- du plaisir de sentir que notre colère collective est forte comme une révolution...
Une révolution ?
- Oups et si elle arrivait sans que les militants, pourtant habitués du terrain, ne la voient ?
- Oups et si elle arrivait sans que les anarchistes et autres libertaires ne la voient ?
- Oups et si elle arrivait sans que les révolutionnaires ne la voient ?
- Oups et si elle arrivait sans que les Nuits Debout ne la voient alors que c’est exactement ce qu’ils appelaient de leur vœux pendant leur cinq mois de lutte ?
La nature a horreur du vide il parait, en ne participant pas, nous laissons la place à quoi ?
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