Une date est posée : 10 septembre : début d’un rapport de force et d’un soulèvement inédit ?!

Loin des démonstrations symboliques, des visées mollement réformistes et des vaines attentes électorales

jeudi 24 juillet 2025

La sinistre loi Duplomb sera-t-elle un des déclencheurs imprévus du début d’une inédite et longue séquence de soulèvement général ?
Ce ne sont pas les combustibles très inflammables qui manquent pour nourrir une révolte radicale, déterminée et puissante. Tout le monde peut très facilement trouver de nombreuses raisons de se révolter. Le régime en place, ses amis et la civilisation industrielle n’arrêtent pas de jeter de l’huile sur le feu le sourire cynique aux lèvres et le lanceur de grenades dans la main. Alors forcément ça énerve...

- Voici un nouveau texte qui désire et soutien le soulèvement, avec une date de posée pour le début de l’offensive : 10 septembre 2025 !
Chiche ?

rdv un peu partout pour s’auto-organiser un minimum avant le coup d’envoi ?
Ca laisse le temps de réviser ses classiques, de se préparer et de choisir quelques cibles pour un début en fanfare ?

Pétition contre la loi Duplomb : un million, et maintenant ?

En quelques jours, plus d’un million de personnes ont signé, sur une plateforme de l’Assemblée nationale, une pétition contre la loi Duplomb. Cette loi a été déposée et défendue par le sénateur du même nom, Laurent Duplomb, qui est aussi éleveur et membre de la FNSEA, le puissant lobby de l’agro-industrie qui dicte les règles au pays. Elle permet la réintroduction de l’acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, interdit en 2018. Cette mesure a été dénoncée par plus de 1000 médecins et scientifiques, notamment en raison des liens probables entre l’acétamipride et des malformations sur des fœtus ainsi que les cancers du foie ou de la thyroïde. Cette réintroduction intervient au moment où le sujet de l’épidémie de cancers commence à inquiéter, à juste titre, la population : le taux de cancer a doublé depuis 1990 et certains, comme le terrible cancer du pancréas, connaissent de très fortes augmentations. La loi fait des méga-bassines, ultra combattues localement car véritable vol d’eau par quelques gros agriculteurs, des infrastructures mieux protégées par l’Etat et autorise l’augmentation en taille des élevages intensifs, déjà responsables de dégradations majeures de l’environnement, comme en Bretagne avec les algues vertes.

La loi Duplomb, c’est donc le triomphe du capitalisme agricole sur la santé publique. C’est le primat de quelques personnes (les agriculteurs sont environ 500 000 et tous ne soutiennent pas cette loi, les grands groupes agroalimentaires sont possédés par quelques familles comme la richissime famille Besnier, propriétaire de Lactalis et 10e fortune française en 2025) sur l’intérêt de la majorité, en particulier celles et ceux qui vivent en zone rurale et qui, comme dans la banlieue de La Rochelle, connaissent déjà des effets terribles de la pollution environnementale générée par l’agriculture chimique.

C’est aussi une réinterprétation des demandes des agriculteurs, qui se sont soulevés à l’hiver 2024, par leurs pseudo représentants : quand les premiers demandaient la fin ou l’encadrement du libre-échange, qui les met en concurrence avec des pays où la législation environnementale est plus faible, les seconds ont choisi pour eux de baisser nos standards pour booster notre compétitivité, plutôt que de remettre en question un système qui appauvrit les agriculteurs du monde entier, mais les enrichit eux. La douille, pour les agriculteurs, est donc complète : sous prétexte de “réduire les normes”, on les soumet davantage à ceux qui leur vendent ces produits et les enchaînent à ce modèle où les petits et moyens sont sûrs de perdre, au profit des gros. Le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, défend bec et ongle cette loi et les médias prennent rarement le temps de préciser que plus qu’un représentant des agriculteurs, c’est un businessman qui dirige le conseil d’administration du groupe Avril, un groupe agro-industriel international d’origine française spécialisé dans l’alimentation humaine, l’alimentation animale, l’énergie et la chimie renouvelable. Il possède des filiales comme Puget (huile d’olives), Lesieur ou Matines (les œufs).

Malgré les tribunes de scientifique ou de médecins, malgré les indignations des ONG environnementales ainsi que des manifestations, la loi Duplomb a été votée au début du mois de juillet, après un passage en commission mixte paritaire, c’est-à-dire devant un petit groupe de députés et sénateurs chargés d’arbitrer entre les deux chambres. Parmi ces 15 parlementaires, nous apprenait Mediapart, il y avait 4 sénateurs directement liés à la FNSEA, 11 exploitants agricoles et un directeur d’entreprise agroalimentaire : le jeu était plié, avec une loi votée par et pour l’agro-industrie. “Vous êtes des alliés du cancer, et on le fera savoir”, a crié depuis les tribunes du public Fleur Breteau, fondatrice du collectif “Cancer Colère”, au moment du vote définitif. Depuis, son cri n’a pas cessé de raisonner dans toute une partie de la population, et la colère face à un vote aussi intolérable, aussi révélateur de la véritable allégeance des députés et du gouvernement, n’a cessé de monter.

Cette colère a pu s’incarner dans une pétition lancée le 10 juillet dernier par une étudiante de 23 ans, sur le site de l’Assemblée nationale. “La Loi Duplomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire, a écrit l’initiatrice de la pétition dans le texte de présentation. Elle représente une attaque frontale contre la santé publique, la biodiversité, la cohérence des politiques climatiques, la sécurité alimentaire, et le bon sens.” A ce jour, la pétition a rassemblé 1,3 million de signataires.

C’est un succès très significatif, surtout en si peu de temps. Un tel engouement pour une pétition remonte à 2016, contre la loi travail, un texte avait recueilli également 1,3 million de signatures, mais sur une durée plus longue. La pétition contre la loi Duplomb va très certainement battre ce record.

L’enthousiasme que suscite cette mobilisation est sans doute lié au fait que contrairement à la pétition de 2016, celle déposée contre la loi Duplomb l’a été sur une plateforme officielle, celle de l’Assemblée nationale, qui implique l’effet suivant : “La Conférence des présidents de l’Assemblée nationale peut décider d’organiser un débat en séance publique sur une pétition ayant recueilli au moins 500 000 signatures, issue d’au moins 30 départements ou collectivités d’outre-mer.”

Et… c’est tout. La loi impose aux présidents de groupe de l’Assemblée nationale de se rassembler sous la houlette de la présidente Yaël Braun-Pivet, pilier du macronisme ayant contribué à toutes les magouilles de passage en force depuis huit ans, et de décider si, oui ou non, la pétition mérite “un débat en séance publique”. Un débat, pas un vote. Pas d’amendement. Pas un retrait du texte. Un débat.

Les débats, les discussions, les conventions citoyennes, c’est tout ce que Macron a proposé aux Français depuis huit ans. Et à chaque fois, il y a eu des ONG, des syndicats ou des partis pour nous dire que c’était fabuleux, génial, ce retour au peuple, ce sens du dialogue. Pour… zéro effet.

On parle tout de même du gouvernement qui, à l’hiver 2018, a déployé une répression intense et décomplexée contre les Gilets jaunes, avec charge à moto et à cheval, mutilations, arrestations préventives et interdictions multiples contraires au droit constitutionnel en matière de liberté d’expression.

On parle tout de même du gouvernement qui, début 2019, a lancé un “grand débat national”, fait remplir des “cahiers de doléances” par des milliers de gens contents qu’on les écoute, tandis que les grands médias se pâmaient devant la générosité d’une telle initiative, pour qu’à la fin absolument rien ne se passe et que les fameux cahiers ne fassent l’objet d’aucune prise en compte officielle.

On parle tout de même du gouvernement qui a fait plancher 150 citoyennes et citoyens au sein de la Convention citoyenne pour le climat, s’est engagé à reprendre leurs propositions “sans filtre” et n’en a finalement pris en compte qu’une petite minorité.

On parle tout de même du gouvernement qui a fait passer en force, via l’article 49-3, une loi de réforme des retraites rejetée par 90% des actifs sondés et qui a mis plus de 3 millions de personnes dans les rues de tout le pays, sans lâcher la moindre concession à des syndicats pourtant bien respectueux et polis.

Et enfin, on parle d’un gouvernement qui s’est maintenu au pouvoir après une défaite électorale cinglante et la perte d’une majorité, même relative, gagnée par la gauche unie au sein du NFP et qui n’a rien obtenu du tout, laissant le macronisme au pouvoir intact.

Il est donc impossible de décemment penser que ce gouvernement pourrait reculer face aux signataires d’une pétition. Non seulement ce serait une erreur d’analyse mais aussi un appel politique tragique : ce serait ajouter un nouvel échec à la longue liste de nos défaites.

Le temps des indignations et des démonstrations de mécontentements est révolu. Ce gouvernement est ultra minoritaire, ultra détesté et il le sait. Mais il tient et continue d’agir avec force car la configuration institutionnelle lui est ultra favorable : d’abord, il dépend d’institutions politiques qui donnent tout le pouvoir à l’exécutif et ont fait des contre-pouvoirs des coquilles vides, pour ne pas dire des attrape-nigauds. Ensuite, il est quasi exclusivement concurrencé par des partis politiques qui le soutiennent passivement : d’un côté le RN, qui approuve tout ce que fait Macron, car son extrême-droitisation fait son beurre, à long terme, et il n’a donc aucun intérêt à le faire chuter. De l’autre, au sein de ce qu’il est convenu d’appeler la gauche, le Parti socialiste continue de berner la population en jouant l’opposant lors des temps électoraux et en soutenant activement le gouvernement le reste du temps, en échange de petits privilèges. Ainsi, la nomination de la leader socialiste Najat Vallaud-Belkacem, compagne d’une des figures parlementaires du PS, Boris Vallaud, à la Cour des comptes, procéderait d’un deal explicite entre gouvernement et PS : sa nomination en échange d’une absence de censure sur le budget Bayrou. Au PS, quelle crasse ne ferait-on décidément pas pour une voiture avec chauffeur ?

Le gouvernement ne tombera pas légalement et continuera de nous faire du mal autant qu’il le pourra. Il ne s’arrêtera pas. On en veut pour preuve que la loi Duplomb, qui va détruire notre santé, fait douloureusement écho aux annonces budgétaires de François Bayrou, qui vont détruire notre droit du travail, notre sécu et notre temps libre. Ces deux coups durs doivent nous faire prendre conscience qu’il est irresponsable de ne pas agir maintenant, d’attendre une présidentielle dans deux ans, de croire que nos votes donneront autre chose qu’un gouvernement bourgeois qui nous pillera et réduira notre espérance de vie. Les appels vibrants à s’inscrire sur les listes électorales, à voter, que l’on lit ici et là sur les réseaux sociaux de la part de personnalités médiatiques, provoquent chez nous le même sentiment d’exaspération que les suppliques au gouvernement : pensez-vous vraiment que l’état de décomposition des institutions françaises font du vote un outil d’action efficace ? N’est-il pas un peu fou de faire des appels au vote quand aucune élection n’est prévue et que le résultat de la dernière en date n’a pas été respecté ? N’est-il pas délirant que face à des trahisons et piétinement successifs de la part de leurs représentants, de droite comme de gauche, depuis au moins quarante ans, on ne propose rien d’autre aux gens en colère que de remettre une pièce dans la machine de la délégation de souveraineté à un petit groupe de professionnels de la politique ? Ça suffit, ce cinéma.

Il ne faut pas appeler à voter, il faut appeler à agir. Et pour agir, il est essentiel de ne pas découper nos problèmes en sous-catégories (“écologie”, “racisme”, “social”) qui deviennent le pré carré de quelques spécialistes. Il ne faut pas traiter la loi Duplomb comme un problème différent des annonces budgétaires de Bayrou. Il ne faut pas non plus traiter ces deux atteintes à notre santé et à notre vie, sacrifiées au profit des groupes capitalistes, différemment de la façon dont la police traite et tue les jeunes racisés ou des logiques qui font que les apprentis se blessent et se tuent au travail. Dans tous ces cas, c’est la force qui triomphe de l’absence de rapport de force.

C’est quoi, établir un rapport de force ? C’est faire en sorte que votre interlocuteur sente qu’il a des choses à perdre s’il ne vous écoute pas. C’est instiller de la peur et de l’incertitude dans le cœur de l’adversaire. Alors, comment on obtient ça ?

D’abord, on choisit une date, ensuite on la prépare et, une fois arrivée, on agit, en sortant des sentiers battus des mouvements sociaux qui ont, par le passé, échoué.

Cette date, il semble que cela soit le 10 septembre. Elle est appelée par un collectif citoyen dont le site internet contient des mots d’ordre et des revendications suffisamment larges pour parler à beaucoup de monde et suffisamment radicales pour ne pas nous exposer à de micro concessions symboliques.

Qu’est-ce qu’une démonstration de colère ? C’est une manifestation Bastille-Nation, dont la temporalité, le parcours, les évènements sont parfaitement connus à l’avance par le pouvoir. C’est une grève d’une seule journée, dont les effets négatifs sont anticipables par votre patron, la direction de la SNCF ou l’Education nationale. C’est une pétition dont on pense qu’elle se suffit à elle-même, et qu’elle donne simplement du travail aux représentants officiels de la gauche et de l’écologie, qui peuvent ainsi afficher, une fois de plus, leurs mines pleines d’espoir à la sortie de Matignon.

Qu’est-ce qu’un rapport de force ? C’est une période où le pouvoir affronte des actions multiples, radicales, impossibles à circonscrire, dont la durée est inconnue, dont les impacts sur l’économie et sur la sérénité de la bourgeoisie sont matériels et tangibles.

La pétition contre la loi Duplomb sera le chant du cygne d’un peuple mécontent si elle se suffit à elle-même. Elle sera la première pierre d’un soulèvement inédit si elle est vécue comme une simple étape de notre révolte : l’estimation de notre nombre et l’évaluation des dégâts que nous pourrons faire. Massifs.

Alors, rendez-vous le 10 septembre ?

- source, avec tous les liens complémentaires : https://frustrationmagazine.fr/petition-duplomb/


ajout le 24 juillet à 14h :

Piratage du site https://mobilisation10septembre.blog/

- des responsables du site ont publié un mot sur Telegram, depuis le site web a été mis à l’arrêt visiblement.

Piratage du site https://mobilisation10septembre.blog/

- Le collectif citoyen dont il est question dans l’article de Frustration Magazine c’est : Le 10 septembre 2025 — Arrêt total : Rejoignez le mouvement pour un arrêt total du pays dès le 10 septembre 2025, une action pacifique pour dénoncer les injustices et reprendre le pouvoir collectivement.
Stop à l’austérité Bayrou ! Le gouvernement sacrifie nos droits : deux jours fériés supprimés, coupes massives dans la santé, gel des retraites, suppression de milliers de postes publics. Ce plan injuste frappe les plus fragiles et détruit nos services essentiels. Une autre politique est possible : solidaire, juste, et humaine.
3 mots d’ordre – Boycott – Désobéissance – Solidarité

- NOTE : ce collectif en reste malgré tout à des revendications (déjà, a-t-on besoin dès le départ de revendications ?) trop mesurées, et il choisit de s’enliser dans les concepts flous, relatifs et dogmatiques de non-violence et de pacifisme...
Mais bon, ça fait un point de départ ...à déborder.

Je préfère ces textes ci :

ou encore :

- pour une réflexion sur la rage et l’émeute :
Domaine d’extension de la rage - À propos d’émeute de Michel Kokoreff : Vingt ans après les émeutes de l’automne 2005 à la suite de la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans un transformateur électrique où ils s’étaient réfugiés pour échapper à un contrôle d’identité, et deux ans après celle de Nahel Merzouk , en juin 2023, flingué à bout portant par un policier alors que la voiture qu’il conduisait était à l’arrêt, Michel Kokoreff dans un bref essai [1] tente une synthèse du fait émeutier qui traverse l’histoire et qui depuis les années 2000 ne cesse de proliférer et de s’intensifier. Pour le sociologue ces « émeutes de la mort » loin d’exprimer un quelconque nihilisme posent une « question éminemment morale » et constituent « un mode de politisation à part entière ». Nous reproduisons en ’bonnes feuilles’ l’intégralité de l’avant dernier chapitre qui reprend et élargit l’essentiel de son analyse du fil émeutier de ces dernières années. (...)
La propagation de l’émeute est de nature émotionnelle : colère, rage, tristesse, haine, mais aussi joie et jubilation. On disait jadis que la rage mène aux jacqueries, l’espoir à la révolution. Marx avait souligné cet « enthousiasme extatique. saisissant les révolutions du XVIIIe siècle, le malaise que leur reflux suscitait. De même, le philosophe et sociologue Henri Lefebvre avait qualifié de « fête la Commune de Paris. Il y avait aussi de la joie et de la gaîté lors du mouvement de mai-juin 1968, dans les manifestations, les universités et les usines, de la haine aussi, comme l’a montré l’historienne Ludivine Bantigny. La rage fut centrale lors de la séquence contestataire de 2016-2020, tant au plan international que national : « rage des peuples », « rage populaire », « jaune de rage », rage du personnel soignant, « femmes en colère » contre les violences sexuelles et sexistes. Elle est devenue une forme élémentaire de la sensibilité collective.
(...)
Émeutes, révoltes ou insurrections ? On retrouve le problème de vocabulaire. Étrange situation « pré-insurrectionnelle », signe de la puissance des Gilets jaunes suscitant l’effroi du pouvoir, que la gauche et les militants radicaux ont d’abord boudé pour y voir à l’œuvre des « fachos ». Ces premiers actes furent parfois qualifiés d’ « émeutes publiques ». La vague jaune n’en était pas moins organisée, porteuse de revendications et d’objectifs précis (hausse des bas salaires et des minima sociaux, référendum d’initiative citoyenne, etc.). Les binômes et trinômes du black bloc s’y sont vite greffés, masquant des identités diverses (étudiants, syndicalistes, journalistes, etc.). Quant à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, les combats dans le bocage nantais y ont encore été d’une autre nature ! Elle a pris la forme d’un mouvement plus long (1998-2018) et organisé en vue de faire commune. Et elle a obtenu une réelle victoire politique après l’annulation du projet de construire un aéroport dans le bocage nantais.
Ces mobilisations ont donc pris des formes différentes. Elles ont aussi été le fait de catégories sociales spécifiques : des fractions appauvries des classes populaires et moyennes vivant entre espaces périurbains et semi-ruraux ; une jeunesse populaire issue de minorités ethniques confrontée à la difficulté de trouver un emploi et assignée à résidence dans les cités d’habitat social ; des classes moyennes supérieures, bien dotées en capital scolaire et culturel, mais vouées à l’incertitude sociale, vivant en centre-ville, voire dans les quartiers gentrifiés ; ici, des « entravés » ; là des « relégués » ; là encore, des « déclassés ». Stratégique, la « coagulation des colères » ne va pas de soi au regard de la logique de séparation qui travaille la France urbaine, comme d’autres sociétés, ainsi que l’avait montré Jacques Donzelot .
Pourtant une telle fragmentation sociale et urbaine ne doit pas occulter certaines similitudes : dimension d’emblée nationale des Gilets jaunes ; usage des
réseaux sociaux ; mise à distance des partis politiques et des syndicats renouant confusément avec la tradition des Sans-Culottes de 1792-1793 et des anarchosyndicalistes de la Belle Époque ; signifiant devenu fédérateur des « violences policières »
. Face à la déterritorialisation des flux du capitalisme, un désir d’ancrage et de collectif a conduit à une reterritorialisation des lieux de lutte et de rassemblement, allant des cités aux ronds-points en passant par les places publiques. D’un mouvement à l’autre, les mécanismes d’agrégation et les effets de composition des acteurs ne sont pas non plus sans points communs.
Et puis, il y a ce que j’ai appelé ailleurs la « diagonale de la rage ». La rage n’est pas synonyme de nihilisme ; elle n’est ni l’énergie du désespoir, ni un manque (de conscience et de rapport de classe, de mouvement social) ; elle est un mode de politisation à part entière.
(...)
On a donc raison de relever cette dimension joyeuse des émeutes et des protestations sociales, en considérant la joie non pas trivialement, mais au sens philosophique de Spinoza : l’augmentation de sa puissance d’agir. Autant de liens vivants que le monde social devient de plus en plus incapable de produire et que l’imaginaire politique renoue.
« La force affective qui provoque les soulèvements tranche avec les aplats du monde social », écrit Ludivine Bantigny. Or ces soulèvements se sont multipliés. D’où vient alors qu’ils ne s’accompagnent d’aucun bouleversement réel ?


Forum de l’article

  • Une date est posée : 10 septembre : début d’un rapport de force et d’un soulèvement inédit ?! Le 24 juillet à 15:11, par Christian MOYON

    Supprimer immédiatement les prérogatives de subvention de l’État vers le privé.

    Récupérer l’argent dont l’État a engraissé les milliardaires et les sociétés privées depuis 10 ou vingt ans, afin de renflouer certains processus de l’État en grande difficultés : hôpitaux, écoles, université, etc.

    Interdire la capitalisation personnelle aboutissant à des trous noirs financiers façon oncle Picsous, il suffit de plafonner, on prend tout ce qui dépasse -> budget de l’Etat.

    Bien sur, il faut plafonner à la source, sinon : fuite à l’étranger.

    Répondre à ce message

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