Voici le premier texte d’une série qui a vocation à faire le lien entre différentes luttes révolutionnaires, à partir d’un personnage : Cléone.
Extrait :
En France, le président ni ses ministres ne pouvaient plus visiter un recoin du pays sans que le village soit colonisé par les forces de l’ordre et ses habitants confinés chez eux. Les flics en venaient à crever des ballons d’anniversaire au prétexte qu’ils étaient jaunes. Quand on lance sur ses enfants, les chiens, les grenades ; quand on les tire au LBD, qu’on les agenouille mains derrière la tête, qu’on envoie sur ses gosses ses milices de BACqueux… c’est qu’on a perdu son sang froid, sa dignité, qu’on se fait dessus.
Nous le savions, il était indispensable et possible de vivre autrement. Chacune devait entreprendre sa traversée, chacun devait se départir de l’assignation à se zombifier. L’intelligence collective produisit concrètement un paysage des plus désirables.
L’autonomie fut le principe actif d’une reconnexion vitale avec le réel. Ce fut long, compliqué, mais pas à pas, rue par rue, bloc après bloc… à base d’émeutes, de cantines populaires, d’occupations, de grèves sauvages, de ZAD, de collectifs de quartier, de sabotages… nous sommes parvenus à libérer tous les corps.
Plus personne n’avait a craindre d’apparaître dans sa singularité, autant de races et de sexualités possibles que d’individus. C’est la multiplicité des conditions d’existences qui permit d’amortir le choc de la catastrophe écologique et d’en finir avec la nécropolitique des oppresseurs. La substitution d’un monde gouverné par le manque au profit d’un monde de désirs a sauvé les vivants. Forts de la solidarité de toutes nos luttes dans le monde, un nouveau continent d’auto-défense émergeait. Seule comptait la puissance historique de nos luttes, notre puissance d’agir retrouvée, notre rage.
Je suis Cléone et c’est depuis le turfu que je vous parle — à force de cavales, de cavales et de révolutions, je suis allée loin… — je vous parle, depuis bien après ce 2022 qui n’a jamais eu lieu. Depuis là je vais vous raconter comment nous avons gagné.
- Je suis Cléone