1. Depuis trop longtemps déjà, le premier Mai pacifié par les syndicats et les partis ne ressemble en rien à une manifestation. La manifestation, devenue marche, est devenue en même temps le grand étalage des calicots de la gauche décomposée. On n’y cherche même plus à se compter ou à démontrer sa puissance. Par l’exercice insipide d’un folklore que tous regardent avec mépris, on ne cherche finalement qu’à se prouver que l’on est encore de gauche. Et tout comme toujours, se dissout dans le spectacle marchand. Quelques vedettes en scène viennent jouer le rôle de l’artiste engagé. Quand on est artiste, on est forcément un peu de gauche. Le journal télévisé montrera pendant deux minutes une joyeuse fête place Rouppe, illuminée de soleil et troublé par la fumée des grills. Dans ce pays tout ce qui est politique finit en foire. Le festival esperanzah est partout. Et ce qui ne devient pas fête, on l’étouffera dans le bruit et l’indifférence.
2. L’année dernière déjà, le cortège de 1er mai révolutionnaire avait réussi à faire apparaitre le réel par-delà le spectacle de la contestation, avait rappelé la différence entre une manifestation et une marche. Et quelles visages que ceux de la gauche décomposée, de ces bureaucrates syndicaux, apparatchiks socialistes, associatifs adipeux, tourne-disque rayés du tube social-démocrate, quelle visages ! Voilà le rouge et le noir qui arrive place Poelart la bouche pleine d’un « Tous le monde déteste Vanderssmissen. » Leurs visages s’emplissent de mauvaise conscience, et d’une rage sourde. Tombe le silence épais d’une honte qu’ils ne manqueront pas de venger. Bien que petit, le cortège du premier mai révolutionnaire a sans doute redonner à plus d’un le gout des commémorations. Que ce jour était creux auparavant.
3. Les syndicats et les partis ont encore le cerveau dans le vieux monde de la démocratie représentative. Ils pensent que la légitimité est une question de quantités. C’est un réflexe de chef que de vouloir être suivit par le plus grand nombre afin de paraitre, eux, légitime à la tables des puissants. L’étrange volonté de massifier, toujours-massifier, sans que l’on sache trop pourquoi au juste, pourrait presque se ranger du côté des affects de commandement.
4. On voit bien, dans la déception des idoles de Youth for Climate combien est devenue secondaire la question climatique, et comme quelques personnes ont trouvé le véhicule propre à les faire entrer par effraction dans les ministères de leurs parents. La masse de manifestants vaut son pesant de médiatisation. Et malgré tout, malgré l’échec cuisant de leur stratégie, l’absence de loi climat, et l’absence de volonté de mettre en pratique ses slogans, le parti du climat continue de dire « venez donc ! soyons plus nombreux ! ». Certes, mais pourquoi faire ?
5. Heureusement, le mouvement gilet jaune, comprit dans son ensemble, a lui sut déjouer le piège de la quantité. Et, l’efficacité d’une manifestation doit désormais se penser en termes de qualité des manifestants. Car nul n’ira négocier quoique ce soit. La manifestation alors redevient un moyen de compter les forces réelles, de mesurer notre puissance commune.
6. Depuis quelques mois déjà, et ce malgré la Marche de la Honte et la collaboration de Rise for Climate, le mouvement gilet jaune, principalement belge, est dans une large mesure, un mouvement écologiste. Car les classes populaires qui le composent vivent directement les effets de la bétonisation. Ceux qui ont un grand jardin se moquent bien que l’on bétonne un parc. Pour d’autre, ce parc est seul lieu où leurs enfants peuvent voir un arbre, caresser de l’herbe, observer un papillon, entendre un oiseau. C’est sans doute pour cela que le mouvement gilet jaune est, dans le tourbillon des forces nouvellement apparue cette année, le mouvement écologiste le plus conséquent. Quand d’autres veulent une loi climat stupide, les gilets jaunes eux, viennent aux manifestations pour la ZAD de Haren. Manifestent pour sauver la foret de Kautille, invitent à des ZAD du coté de Tournai. Déjà le mouvement gilet jaune avait été le premier à dénoncer avec force l’écologie punitive, celle qui taxe les plus pauvres pour que soit conservé le mode de vie écocide des plus fortunés. Quelques soient les efforts agressifs de la bourgeoisie pour que ne se mêlent pas contestation sociale et contestation écologique cette convergence des causes et déjà faites. Car absent de présupposés, poussé par l’urgence, la plupart des gilets jaunes sont à la recherches, à l’affut, de solutions et de moyen d’arriver à ces solutions. D’évidence, le gros du mouvement écologique qui vient sortira de ces rangs-là plus que des rangs des marches climats desquelles, nous le savons, quelques sincères se détacheront pour rejoindre enfin le parti de l’insurrection. Quelques jeunes pour le climat, eux, sont déjà en train d’emprunter ce chemin.
7. Saint Gilles aussi, est un commune particulière, où se, mélangent diverses classe sociale, diverses origines, dans une certaines cultures contestataire, oscillant de la plus molle et spectaculaire à la plus réelle. Lors d’une manifestation contre la loi anti squat, 200 manifestants nassés rue Haute, avaient gouttés de la solidarité du quartier. Très vite, un jeune homme blanc depuis le 1er étage de son immeuble pointa un baffle vers la ligne de police, crachant du son anti-flic. Un snack du coin, distribua de l’eau et des frittes en solidarité. Il parait même que, comme d’autres habitants du quartier il cacha quelques personnes chez lui, pour empêcher les flics de les attraper. Puis quelques héros et héroïnes aussi, vinrent caillasser par derrière les lignes qui nous retenaient. C’était beau et tendre. C’était un peu de l’esprit de Saint Gilles. Voilà pourquoi toutes tentatives de manifestation sauvage dans le quartier de Saint Gilles, et les gilets jaunes en savent quelque chose, est si vite réprimée. Cette commune est le ventre mou de Bruxelles, celui par lequel pourrait venir la contestation, et celui que diverses forces agitent en ce sens. Montrons au quartier où se trouve le parti de la révolution.
8. Enfin, nous nous amusons d’avance de la rencontre entre des militants anticapitalistes, des gilets jaunes, des écologistes et des autonomes (et parfois tout ça en même temps) d’avec les restes de la gauche décomposé. Ce qui s’annonce sera une fois de plus un formidable travail de clarification. Ce travail commencé un 17 novembre n’en finit pas de nous donner des armes en vue du prochain round. Bientôt le réel.Le premier mai révolutionnaire est une étape vers ce destin.
9. Nous sommes la nuée qui pleure la fin des oiseaux.
(Source : groupe Anathème - Belgique)