L’éditorial du journal Le Monde du 24 décembre est un bon exemple de ces discours merdiatiques qui se situent à fond du côté des Pouvoirs et du régime malgré des discours qui se prétendent posés, objectifs et équilibrés.
Extraits de l’édito du Monde :
Editorial. L’« acte VI » de la mobilisation, samedi 22 décembre, a été marqué par des violences et des actes antisémites. Pour que le sens originel du mouvement ne soit pas dénaturé, il est urgent que les corps intermédiaires reprennent la main.
Au bout de cinq semaines, plus la mobilisation des « gilets jaunes » s’essouffle, plus elle se radicalise. Des irréductibles – livrés à eux-mêmes puisque le mouvement ne dispose d’aucune structure – cherchent la confrontation violente. Ils dénaturent ainsi le sens de la colère originelle. Dans ce contexte dangereux, une partie de la réponse viendra des corps intermédiaires – syndicats, partis politiques, associations, élus locaux – que le gouvernement comme les « gilets jaunes » n’ont cessé d’affaiblir ces derniers mois ou ces dernières semaines. Face aux risques de la violence, il y a, au contraire, urgence à leur redonner enfin toute leur place.
Comme le gouvernement, Le Monde met fortement en avant quelques quenelles et quelques ivrognes pour tenter de dénigrer tous les gilets jaunes. Il met aussi en avant des motards policiers pris à parti samedi 22 décembre, mais sans parler du contexte local ni du contexte général de pressions et violences policières.
Il se garde bien de parler de tout le reste, des manifs en tout genre, des gilets jaunes qui appellent à la démocratie véritable et au partage, et Le Monde se garde d’insister sur les innombrables violences et humiliations commises par de très nombreux policiers !
Comme le gouvernement son complice, le journal Le Monde reprend les chiffres du nombre de manifestants fournis par l’Etat exclusivement, et omet de parler des manifestant.e.s qui ont été arrêté.e.s ou empêché.e.s sur le trajet pour aller manifester, et de ceux qui n’ont pas résisté à la terreur volontairement imposée par les forces policières aux ordre de l’Etat et à la peur volontairement distillée par les politicards et les merdias pour pousser les gilets jaunes à ne pas retourner dans la rue !
Comme le gouvernement son complice, Le Monde situe la démocratie et l’ordre dans les institutions en place et les machins discrédités depuis longtemps que sont les partis, les élus et les syndicats. Comme tous les oligarques et les lobbies ses complices, Le Monde omet comme d’habitude d’admettre que ce système est fondamentalement antidémocratique malgré ses jolies façades, qu’il est structurellement violent et injuste, destructeur et terroriste.
Toutes choses qui permettraient de comprendre pourquoi un nombre croissant de personnes se révoltent, et sont à présent prêtes à désobéir face au mépris, aux violences policières et au verrouillage criminel de tout.
Face aux tyrannies en place qui ne veulent rien lâcher, il est parfaitement logique et sain que de plus en plus de personnes refusent de jouer le jeu truqué et vain du système, et sont prêtes à se soulever, quitte à faire des émeutes, de la casse de matériel (poubelles, banques, magasins de luxe...), et à déplaire aux oligarques et autres lobbies cyniques qui bien sûr viennent ensuite, comme le Monde, faire des leçons de bienséance et de démocratie.
Sur le terrain, on ne voit pas des minorités de gilets jaunes qui « se radicalisent » parce que la mobilisation s’essouffle, on voit au contraire une prise de conscience généralisée de la violence et du verrouillage du système au profit des riches et des puissants, et de plus en plus de personnes qui ont bien compris qu’il fallait résister par divers moyens, ne pas se laisser faire, sortir des clous qui arrangent bien les Pouvoirs (car ces clous sont conçus par et pour le confort et la tranquillité des Pouvoirs) et ne pas se diviser.
Comme le gouvernement, Le Monde en appelle avec anxiété aux éternels dérivatifs, syndicats réformistes, partis, élus, pour que ces étouffeurs et collabos patentés, en collaboration avec l’Etat et les grands capitalistes, changent au compte goutte les petites choses qu’il est nécessaire de changer pour que rien ne change au fond.
A nous de rejeter les miettes, les os à ronger, les pseudo solutions toutes faites et simplistes telles que le RIC, etc.
Si jamais le système en place est davantage en difficulté, il sera même prêt à faire sauter quelques fusibles : démission de manu, dissolution de l’assemblée nationale... Et il essaiera alors de nous enfumer et de diluer la contestation lors de nouvelles élections.
Pour tout renverser vraiment afin de tout reconstruire, nous ne pouvons utiliser les outils conçus sur mesure par et pour le système !
Du haut de leurs murs tachés de sang, les tyrans, qui ne veulent rien changer au système qui leur offre argent et pouvoir, qui détruit les humains et la planète, en appellent à présent « à l’ordre et à la concorde ».
« Oyez oyez bon peuple égaré, nous allons vous écouter avec attention de loin depuis nos hautes tours, alors rentrez à présent chez vous sinon nous allons continuer à vous matraquer, à vous arracher des yeux et des mains afin de retrouver le calme, l’ordre et la concorde. Nous savons mieux que vous ce qui est bon pour vous. »
En fait, les Pouvoirs ont eu un peu peur, alors ils font tout pour diviser et nous renvoyer à la niche, là où ils pourront continuer à nous enchaîner, nous jeter des os à ronger et nous enfumer avec des mars et des décors en carton pâte.
Conclusion
les gilets jaunes et autres révoltés doivent continuer de plus belle, car on ne peut pas se contenter de miettes rances et on n’a plus grand chose à perdre.
Et ce qu’il y a de bien avec ce système hyper verrouillé, extrémiste et jusqu’au boutiste, c’est qu’on ne peut plus s’arrêter en chemin, c’est tout ou rien. Si on se contente de demi-mesures on se fera enfumer, on est donc obligé de tout renverser et de tout reconstruire si on veut vraiment vivre mieux et éviter la destruction programmée du vivant, si on veut éviter que le système en place rende la planète invivable dans tous les sens du terme.
et aussi : Le SOS des Gilets jaunes de Senlis - Face à un mouvement populaire, s’inscrivant dans la durée, commençant à faire des émules à l’étranger et ayant prétention à bouleverser les règles du jeu politique et économique, les médias dominants (éditorialistes en tête) resserrent les rangs. Après le moment des réductions grossières (assimilation des Gilets jaunes à l’extrême droite, à des nouvelle formes de poujadisme, ou encore à des incultes égoïstes ne s’intéressant qu’à leur pouvoir d’achat sans préoccupation pour l’écologie), arrive le temps de la décrédibilisation radicale en vue de diviser et d’affaiblir le mouvement : Sommations incessantes à ne pas aller manifester dans les grandes villes ; surexposition des violences (des manifestants) ; injonctions unanimes et unilatérales à les condamner ; délégitimation des revendications sociales et de certains représentants des mobilisations ; chantage à la survie des petits commerçants et au ralentissement de l’économie française, etc. Autant de rappels à l’ordre déversés de manière continue sur les chaînes d’information telles que BFM-TV, LCI ou CNews.
Le mouvement s’essoufflerait et, pour certains commentateurs, les gilets jaunes mobilisés seraient désormais une poignée d’irréductibles en voie de radicalisation cherchant à faire vaciller la démocratie. Pour les médias dominants, il s’agit en fait de trouver des solutions de sortie de crise pour préserver le gouvernement en place afin qu’il « garde le cap » des réformes néolibérales tout en continuant à défendre les institutions qui contribuent à légitimer son pouvoir. Une fois de plus, ces médias fonctionnent comme un instrument d’oppression symbolique des mouvements sociaux, et des classes populaires et moyennes en particulier.
En prime, un post d’une journaliste outrée par BFMTV :
UNE JOURNALISTE S’EXPRIME :
“j’en peux plus de ce mépris de classe“
J’avais du mal à comprendre la défiance des gens vis à vis de BFMTV. Je suis journaliste et diplômée d’une école. J’ai donc décidé de regarder exclusivement BFMTV pendant trois jours. La suite va vous étonner.
Premier jour de mon long calvaire : surlendemain de la manif du 1er décembre. On apprend que plusieurs personnes sont blessées par des tirs de lacrymo. Une personne est décédée (Marseille) une autre a perdu sa main Pendant ce temps BFMTV passe en boucle un reportage sur Les CRS agressés par “les manifestants”. Oui … Les manifestants. Aucune personne ne parle des blessés, ni des conditions de travail desdits CRS (qui ont bossé plus de 20H. Ce sera le seul reportage de la journée. Pas un mot sur les gens dans les blocages, leurs revendications etc. Mais un expert business explique aux commerçants des champs élysées comment se faire rembourser des dégâts. L’animateur – qui devrait brûler se carte de presse – se lamente sur “les pauvres commerçants. (On parle quand même de multinationales dont la moitié payent pas leurs impôts en France, on est sur les champs élysées je rappelle c’est pas des patrons de PME). Le mec censé être journaliste continue sa litanie sur “les touristes qui vont avoir une mauvaise image de la France. Donc les gilets jaunes racontent qu’ils galèrent à bouffer le soir et BFMTV est en boucle sur les Qataris qui pourront pas acheter des sac Channel. Je suis journaliste, payée au smic. Je comprends pas tellement la logique de ce confrère.
Je rappelle qu’un journaliste ne doit pas donner son opinion mais interroger des gens. Je suis sceptique quant à la démarche de BFMTV, voire j’ai envie de brûler ma télé. En plateau un gilet jaune – enfin. Ils ont trouvé le seul GJ macroniste (il a voté macron et compte le refaire)
Blanquer est sur le plateau- s’en suit 40 minutes de non verification des faits total – on explique que la France est “en pointe pour faire payer les impôts aux Gafa – sans que personne intervienne. C’est pas de l’info, c’est un espace politique. Le gilet jaune appelle les lycéens à ne plus bloquer les lycées et à se calmer, Blanquer approuve. Le gilet jaune appelle à ne pas manifester le samedi qui suit. On se demande encore si c’est une chaine d’info.
Le reste de la semaine, c’est pareil et en pire. On répète en boucle “qu’il y aura des morts”, je savais pas que les journalistes étaient des prophètes. Une journaliste dit “les manifestants passent à l’offensive avec du sérum physiologique”. Je savais pas que de l’eau pouvait servir d’arme de guerre. Tout ce que j’ai appris à l’école (bien vérifier ses sources, ne jamais émettre de jugement de valeur ni d’avis personnel, bien vérifier à l’équilibre des paroles) n’est pas appliqué par BFMTV Et pire que ça – 80 % du temps d’antenne est réservé aux “experts” et autre éditorialistes. Ils ne sont jamais contredits et sont majoritairement libéraux, en accord avec la politique gouvernementale. Là aussi, c’est loin d’être du journalisme. Je vais pas vous faire toute la semaine sur BFMTV – juste aucune image des lycéens arrêtés à Mantes-la-jolie, toujours rien sur les blessés, rien sur l’enquête contre Ruffin, rien sur les rassemblements festifs. Alors que 80% du temps d’antenne c’est meubler sur du vide.
Samedi je vais manifester : marche pacifique, sans heurt (avec le cortège antiraciste) et bon enfant. Les scènes de danse ne sont pas reprise par BFMTV, à la place on voit non stop, les champs élysées qui brûlent.
Le mot “casseur” est prononcé 145 fois. Partout en France, des images de gens qui défilent – pacifiquement. Pour la première fois, les gilets jaunes et écolos convergent. Une image super forte puisque le mouvement des gilets jaunes part d’une “”grogne”” contre une taxe “”écolo””. Mais ça, BFMTV s’en fout. Ca fait pas du chiffre. Savoir que 175.000 personnes marchent ensemble, que les morts annoncés ne sont que fiction et que 80% de la France est calme. Ils sont en boucle sur Paris et les casseurs, de manière à croire que la mobilisation se résume à ça. Le retour des experts qui clament que “c’est un gros succès pour le gouvernement” et que “1300 arrestations c’est bien”. Donc on ne parle pas de du côté pacifique mais surtout on loue le fait que des gens aient été arrêtés, parfois parce qu’ils avaient des lunettes de piscine. Personne ne s’interrogera sur la légitimité des arrestations pour BFMTV, c’est normal (je rappelle qu’ils se prétendent journaliste). Aucun avocat, rien. Juste des gens qui se félicitent de l’action gouvernementale.
Je m’arrête là, incrédule et vraiment en colère. En colère parce que ça me heurte de voir qu’on fait la part belle à des éditorialistes, dont le seul travail est d’exposer un avis basé sur du vent, sans avoir parlé avec la moindre personne au smic depuis 1992. j’en peux plus de ce mépris de classe suintant, de la part d’une infime partie de notre profession. J’en peux plus de voir un fossé se créer entre les citoyens et les journalistes parce qu’il y a une dizaine d’abrutis qui déshonorent notre profession. Parce qu’une partie des journalistes trouvent ça plus “noble” d’aller diner avec Edouard Philippe et de faire un direct devant l’Elysée, plutôt que de sortir de Paris pour faire un reportage. chaque année, 60% d’une promotion sort de sciences-po, que les gens issus de la diversité, après un long parcours du combattant pour arriver à être diplômé, se retrouvent dans un monde du travail où le carnet d’adresse et les habitus sociaux comptent plus que bosser correctement. Je comprends, au vu de BFMTV, que les gens nous méprisent. Mais j’ai envie de leur dire : nous journaliste, on est aussi des damnés, prêts à bosser trois semaines sur une enquête pour toucher 100 euros, prêts à faire des journées de douze heures d’affilées à copier-coller des depêches de 5 heures du matin à 14 heures, à accepter de renoncer à tous nos droits élémentaires, a être payés moins que le smic horaire. Mais tant que des “experts” et autres éditorialistes, feront autant de mal à notre profession, ce sera très compliqué de renouer ce dialogue là avec le reste de la population.
Je vous laisse avec trois trucs entendus sur BFMTV.
Des CRS qui chargent des manifestants (non armés) à cheval. Et des gens en plateau (les mecs de BFMTV ont jamais vu un terrain de leur vie) qui s’extasient “c’est beau”. Un gilet jaune qui explique qu’il trouve ça scandaleux que l’Etat brade au privé les aéroports et les barrages. Un expert lui répond “de toute façon vous êtes pas un vrai gilet jaune, vous parlez trop bien pour être un gilet jaune.
source : Licia Meysenq sur Twitter
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